Difficile de se rendre dans un bureau de vote lorsque l’on est hospitalisé. Pour ceux qui souhaitent exercer leur devoir de citoyen, des particuliers mandatés par le procureur de la République parcourent les couloirs des hôpitaux pour recueillir les procurations. De la clinique au commissariat, voyage d’une procuration.
Vendredi 7 mars, 10h30: Aurore Bordez arrive à la maternité Jeanne de Flandres à Lille. Fiches et stylo en main, elle se présente à l’administration de l’hôpital, qui lui indique les candidates au vote par procuration. Direction le 1e étage, au service prénatal. Il y a trois chambres à visiter.
Hospitalisée depuis dix jours, Alice accouchera sans doute la semaine prochaine. En attendant, interdiction formelle de se déplacer. “Comme j’habite Halluin, je ne pensais pas pouvoir faire ma procuration depuis Lille. J’avais fait une croix dessus.”
Dans les hôpitaux, certains patients sont originaires d’autres régions: le commissariat de Lille se charge de faire le relais avec les bureaux de votes de toute la France.
“J’y tenais, quand même : voter, c’est notre devoir”, reprend Alice, qui a confié à son mari le soin de le faire pour elle. Elle remplit les documents : coordonnées, date de naissance et nom du mandataire suffisent.
“Avec un peu de chance, vous serez sortie pour le second tour”, la console Aurore Bordez.
Alice sourit : “En tout cas, le bébé, lui, sera trop jeune pour voter…”
Deuxième chambre, la visite tourne court. La jeune femme a changé d’avis. “Ça arrive de temps en temps”, explique Aurore Bordez. “Les gens en font la demande puis ils reviennent sur leur décision.”
Chambre suivante, Hisnahen, 25 ans, est trop faible pour se lever. A son cinquième mois de grossesse, elle enrage d’être immobilisée dans un lit d’hôpital. Pour elle aussi, c’est le futur papa qui ira deux fois dans l’isoloir.
“Comment ça se passe si je suis sortie dimanche ?”
“Vous irez voter vous-même”, la rassure Aurore.
Par sécurité, elle remplit la procuration pour les deux tours. “Comme ça, si vous n’avez pas la force d’aller au bureau de vote, votre mari ira pour vous.”
Deux signatures, la fiche est découpée et Aurore dépose le coupon à conserver sur la table de nuit.
11h30, il est temps de repartir, direction le commissariat du Vieux-Lille. Plus de procurations pour aujourd’hui, c’était la dernière collecte avant le premier tour. Cette année, environ 200 bordereaux sont parvenues au commissariat de cette façon, dix fois moins qu’aux dernières élections présidentielles. Ils ont été recueillis dans tous les hôpitaux de Lille, dans les maisons de retraite et aux domiciles des gens qui ne peuvent pas se déplacer.
“Ça va plus loin que de rendre un simple service. Pour les personnes handicapées, par exemple, leur permettre de voter c’est une façon de leur dire ‘vous êtes aussi un être civique à part entière’.”
Aurore est dans les temps : les fiches sont déposées au commissariat à midi. Dans la matinée, d’autres demandes sont arrivées pour le premier tour, mais “c’est trop tard”, explique-t-elle . Cet après-midi, les bordereaux seront triés, listés et envoyés par la poste pour la levée de 17h.
Un timing bien précis : si la procuration n’est pas arrivée au bureau de vote dimanche, les voix d’Alice et d’Hisnahen ne seront pas prises en compte.
Le vote par procuration
En France, la procuration est facilitée depuis 2003.
La présence du mandataire n’est plus nécessaire pour en effectuer la demande : un nom et une adresse suffisent généralement.
Elle peut s’effectuer au plus tard l’avant-veille du scrutin.
Si vous êtes immobilisé à domicile, il suffit de contacter le commissariat de police de votre ville qui enverra quelqu’un recueillir votre demande de procuration.
A l’hôpital, indiquez votre souhait au personnel soignant qui s’en chargera pour vous.
Mathilde Bellenger
vendredi 7 mars 2008
Lille - Voter au fond de son lit
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire