vendredi 7 mars 2008

Tourcoing- Bataille électorale autour d’une rue


Les habitants du quartier du Pont-Rompu, dans le nord-ouest de Tourcoing, voient défiler les candidats aux élections municipales. Enjeu électoral local: la réhabilitation du quartier. Christian Vanneste, le candidat UMP, et Michel-François Delannoy, le candidat PS, s’opposent sur l’avenir des maisons murées de la rue Jules Lerent et des espaces verts alentour. Ils sortent les arguments qui vont droit au cœur… de l’urne.


Christian Vanneste a frappé aux dizaines de portes de la rue Jules Lerent et expliqué aux locataires que “s’il était élu, il ferait tout pour que cette rue ne soit pas rasée.” Depuis, la rumeur court au Pont-Rompu… Les maisons ne seraient pas détruites finalement? Les habitants ne savent plus qui croire. Malik Madji, médiateur de l’association des Ruisseaux installée dans la Maison des services, ne s’étonne pas du récent ballet des candidats : Christian Baeckroot venu ce dimanche à 7 heures du matin, histoire de ne pas croiser de jeunes, et puis les autres qui font du porte-à-porte. Mais de là à convaincre les habitants en jouant sur leurs craintes…

La réhabilitation est un enjeu central dans ce quartier. Suite aux graves problèmes de trafic et de délinquance il y a quinze ans, la solution retenue à l’époque avait été de détruire les barres et de restreindre le nombre d’habitants. Au dernier recensement, les habitants du quartier n’étaient qu’un peu plus de deux mille. Un nombre qui ne cesse de se restreindre. L’école maternelle a dû être fermée en 2003. Depuis, la situation s’est améliorée. Récemment, un projet a été présenté par les services municipaux à l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.
Quatre-vingt maisons doivent être construites d’ici deux ou trois ans. En attendant, à chaque fois qu’une famille part d’une des maisons de la rue Jules Lerent, et de certaines autres rues du quartier, le logement est muré. Des garages aussi seront fermés et les jardins attenant aux maisons, agrandis.

Selon Louis Alliot, en charge du logement à la Ville de Tourcoing, l’idée est de “favoriser la mixité sociale et le parcours résidentiel”, exploiter tous les espaces verts et accueillir de jeunes couples avec des enfants pour “renouveler la population”. Le projet a aussi un aspect économique, puisque des discussions sont en cours pour créer un complexe commercial, la “Promenade de Flandres”.

Le projet d’ANRU va-t-il être maintenu ?
D’après Monique Trackoen, directrice régionale du bailleur social Logicil-CHM, chargée de la réhabilitation au Pont-Rompu, le dossier ANRU a été déposé par le service municipal en charge des questions de logement le 17 janvier. Au centre du dossier, “la proposition de démolition de la rue Jules Lerent et du square Debroglie.” Comme “le dossier ANRU n’a pas encore été signé”, Monique Trackoen s’étonne aussi d’avoir entendu dire que d’autres informations étaient ces temps-ci “délivrées sur le terrain”.

Alors, la question se pose : le dossier ANRU est-il suffisamment avancé pour que quelle que soit l’issue des municipales, il soit maintenu? Christian Vanneste peut-il prétendre que “les maisons en voie de destruction ne seront pas détruites?” Son directeur de campagne, Gérald Darmanin, est formel : “Le dossier ANRU dit seulement que pour un logement détruit, un logement est reconstruit.” Il permet surtout d’obtenir le financement de la réhabilitation. “Christian Vanneste ne veut pas de la destruction, il prône l’accession à la propriété, via des crédits sociaux.

L’équipe socialiste en place a engagé le projet dans le sens d’une réorganisation de l’occupation de logements locatifs individuels de grande taille (T4 pour 80% d’entre eux). Deux réunions publiques ont été organisées avec les habitants en 2007. Michel-François Delannoy, alors adjoint au maire, était présent pour “recueillir les questions et les attentes” des habitants. Pourtant, au service en charge du logement à la mairie, Louis Alliot ne pouvait toujours pas garantir “le maintien du niveau de réalisation du projet si l’ANRU s’engage moins”.

D’un côté comme de l’autre, on vend donc la peau de l’ours avant de l’avoir tué. On se renvoie la balle aussi. François Camerlynck, directeur de campagne de Michel-François Delannoy, dénonce l’intérêt électoraliste du porte-à-porte ciblé de Christian Vanneste. D’autant plus que ce dernier, qui avait écrit à Logicil pour savoir si la vente des maisons de la rue Jules Lerent était possible, avait déjà obtenu la réponse négative du bailleur social. Par ailleurs, il explique que Christian Vanneste a voté en faveur du projet de rénovation urbaine. Du côté de l’opposant UMP, on répond que Christian Vanneste “n’avait pas le moyen d’intervenir” pour empêcher ce projet. Gérald Darmanin, son directeur de campagne, riposte à son tour : le conseil municipal profite de l’ANRU pour “vendre des terrains à des investisseurs commerciaux”. Un projet a bien été mis sur les rails par Michel-François Delannoy, également président de la mission locale.

Les habitants ont appris que plus d’une centaine de magasins seraient implantés. Une occasion de donner de l’emploi aux résidents de Pont-Rompu.La proximité avec les habitants aura à coup sûr un impact sur le vote de dimanche. Au Pont-Rompu, on s’abstient facilement mais on est aussi prêt à se mobiliser pour le candidat qui a eu des attentions. A ce niveau-là, les autres candidats, Michel Van Tichelen et Christian Baeckroot, semblent bien moins implantés.


Lucie Romano

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