Gérard Caudron, le candidat du Rassemblement citoyen, vient d’être désigné maire de Villeneuve d’Ascq. L’homme avait déjà été le premier des Villeneuvois de 1977 à 2001. Il reprend son fauteuil au maire sortant Jean-Michel Stievenard. Portrait d'un cas politique.
Ses anciens amis socialistes le surnomment le hérisson. Pour sa coupe en brosse. Et aussi parce qu’il pique des colères. Sa voix est tonitruante. Elle résonne dans son petit bureau de maire honoraire du premier étage de l’hôtel de ville. Son dernier coup de gueule ? Contre Jean-Michel Stievenard dans ces élections municipales de mars 2008. Car même si leurs deux programmes sont de gauche, leurs personnalités sont devenues incompatibles. Pourtant Gérard Caudron et Jean-Michel Stievenard étaient amis. En 2001, Caudron, en fin de mandat, avait adoubé Stievenard, son premier adjoint, pour qu’il lui succède à la tête de la ville. Le premier conflit a éclaté peu après l’élection, à l’occasion des legislatives, lorsque le nouveau maire restant fidèle au PS, a soutenu de ce fait… l’adversaire de Gérard Caudron. Gérard Caudron rend alors sa carte du parti. C’est la fin de trente-cinq ans d’adhésion au socialisme. Depuis, il entretient une rancoeur tenace contre le trio du PS local, Pierre Mauroy, Bernard Derosier et Jean-Michel Stievenard. Gérard Caudron joue la carte de l’homme seul face à tous. Son bureau est depuis sept ans à deux portes de celui du maire. Pendant la campagne des municipales, Caudron et Stievenard jouent à celui qui dénigrera l’autre le plus efficacement.
A ce jeu de la guéguerre, c’est Gérard Caudron qui s’est montré gagnant. Car "il y a une véritable histoire entre Caudron et les habitants", explique un militant. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, personne ne nie l’implication qu’a mis le jeune Gérard dans la fondation de la ville nouvelle en s’installant à Ascq en 1970. Et tout le monde reconnaît les efforts du maire dans le développement de sa ville. Malgré les rivalités actuelles, Didier Manier, troisième de la liste de Jean-Michel Stievenard, le voit toujours comme le représentant de "l'âge d’or de Villeneuve d’Ascq". Celui qui a porté de grands projets, comme le parc du Héron. Et a fait de la quatrième ville de métropole, un maillon central de la chaîne communautaire. Son attitude est charismatique aussi. "C’est quelqu’un qui sait dire non", affirme Faustin Aïssi, troisième sur sa liste.
Gérard Caudron a souvent haussé le ton. Cette année encore, à la communauté urbaine où il siège depuis trente et un ans, il a fait front contre le projet de Grand Stade. Surtout, Caudron sait donner l’impression aux gens qu’il s’intéresse à eux personnellement. Farid Oukaid, 31 ans, l’a rencontré à treize ans alors qu’il était en colonie de vacances en Allemagne. "Il a passé une heure à discuter avec nous, il s’est intéressé à nous, ça m’a marqué." Jusqu’à avoir envie de le suivre dans cette campagne. Il est numéro 9 sur sa liste. Caudron est un maire qui aime se montrer. Pendant la campagne, il a repris l’habitude de sillonner les rues pour se rendre accessible. Cela a fonctionné : au marché, entre les deux tours, les habitants étaient formels : il est aimé des Villeneuvois parce qu’"il dégage beaucoup de chaleur" et "sait écouter". En 1982, cet orateur né écrivait déjà dans Paroles de maires, le magazine de la mairie de Villeneuve d'Ascq : "J’ai une certaine facilité oratoire mais il faut la prendre non comme une qualité, mais comme un goût : quand on parle en public, on crée un lien avec ceux qui écoutent. Je crois beaucoup au contact des regards, aux poignées de mains." Ces derniers mois, il a serré beaucoup de mains. Et a fait des bises aussi. Lors du premier tour, dimanche dernier, aux petites mamies dans les bureaux de vote. Mais d’après Faustin Aïssi, "pour les nouveaux arrivants aussi, Caudron apparaît comme une personnalité crédible". Mieux perçu que le maire sortant.
Dans son petit bureau du premier étage de l’hôtel de ville, le portrait de François Mitterrand trône. Son dernier mentor politique. Caudron est-il fidèle à ses engagements ? Dans cette campagne des municipales, il a entretenu l’espoir du MoDem avant de lui préférer les Verts. Par ailleurs, même s’il s’est toujours dit "un homme de gauche", il a assumé le report des voix de l’électorat de droite sur sa candidature. Sur sa gauche, le communiste Marc Delgrange, qui le soutient au deuxième tour, n’est pas dupe. Il s’attend à se comporter "comme un syndicat avec la direction". Alors, opportunisme ou indépendance ?
Gérard Caudron a créé son propre mouvement en 2002, Rassemblement citoyen, pour ne plus avoir besoin de négocier. Mais selon de vieux habitants de la ville, cela n’empêche pas le candidat d’Ensemble pour Villeneuve d’Ascq 2008, d’être "une girouette opportuniste". C’est aussi l’avis de Victor Burette, jeune homme de 19 ans vingt-cinquième sur la liste de Jean-Michel Stievenard. Selon lui, le slogan de campagne de Caudron, "Il n’est pas nécessaire d’être d’accord sur tout pour bien travailler ensemble au service de tous!" est révélateur de méthodes "opportunistes".
"Je suis meilleur aujourd’hui qu’il y a sept ans", explique pourtant Gérard Caudron.
Lucie Romano
dimanche 16 mars 2008
Villeneuve d'Asq - Caudron, le "hérisson" qui dit non
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